Le chronomégaphone est le premier appareil de cinéma parlant. Mis au point après 1908 par la firme Gaumont, son succès planétaire est abrégé par le déclenchement de la première guerre mondiale. Il est capable de diffuser avec un synchronisme parfait l’image et le son d’un film.
Les laboratoires Gaumont travaillent sur la question du son depuis leur installation aux Buttes-Chaumont en 1900. Ces recherches se sont concrétisées par le dépôt de plusieurs brevets de synchronisation entre 1902 et 1920. À partir de 1902, les établissements Gaumont proposent le système de synchronisation le « plus fiable et perfectionné » : le chronophone. (source)
Le chronomégaphone est composé du projecteur « Chronophone » et d’un phonographe; l’appareil est synchronisé par un appareil appelé « chef d’orchestre » et le son est amplifié au moyen d’une pompe à air comprimé. Le mécanisme entier ressemble à ceci:
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Et son système de son à cela:
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D’après Léon Gaumont, une cinquantaine de chronomégaphones seulement a été fabriquée et envoyée à travers le monde : Europe, Canada, les États-Unis d’Amérique, Mexique, Inde, Australie, Japon
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A l’époque, c’est toute une sensation quand l’appareil arrive en ville. Par exemple, l’Ouest Éclair du 10 septembre 1908 en parle en termes dithyrambiques lorsqu’il arrive à Rennes:
L’un de ces chronomégaphone sera prochainement vendu aux enchères. Son histoire est tout à fait fascinante.
Il pèse pas moins de 450 kilos, pour une valeur estimée à un million d’euros. « C’est non seulement l’appareil le plus sophistiqué parmi ceux conservés dans des collections publiques ou privées, mais il s’agit surtout du seul qui soit resté intégralement conservé avec tous ses accessoires, petits comme grands : malles et leur contenu, affiches, ainsi que 14 « phonoscènes » dont sept avec disques, ainsi qu’une dizaine de films muets« .
L’appareil avait été acheté au début de l’année 1912 pour 8.330 francs or, c’est-à-dire l’équivalent de deux millions d’euros. Son acquéreur, Charles Proust, avait pour ambition de faire fortune en faisant la tournée des villes du Mexique pour montrer ses « photoscènes ». Le modèle est réparti en quatre malles et fonctionne sur courant continu de 70, 110 ou 220 volts. La première représentation à Mexico, en mai 1912, faillit tourner à l’émeute. Charles Proust n’avait pas prévu qu’il fallait adapter son appareil au courant électrique alternatif du Mexique et ne dût son salut qu’à un bricolage conçu à la hâte. L’aventure tournera court à cause de la révolution mexicaine : « L’insécurité règne et il est compliqué de se déplacer à travers le pays pour renouveler son public. De plus, l’éloignement de la France empêche l’achat et la livraison de nouveaux films parlants« . Après un passage par Cuba en 1912, puis au Costa-Rica en 1913, le chronomégaphone est rentré en France où il est resté endormi pendant cent ans.